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Entretien avec Václav Klaus sur la crise migratoire

Pages Françaises, 26. 4. 2016

La crise migratoire est un thème majeur de la scène politique européenne. L’ancien président tchèque, Václav Klaus, nous a accordé un entretien exclusif où il apporte son éclairage à l’actualité récente.

Le pape François a ramené, depuis l’île grecque de Lesbos, 12 réfugiés musulmans au Vatican. Le plus haut représentant de l’église catholique romaine a dit que la décision, concernant l’acheminement de 12 réfugiés syriens, était un geste « purement humanitaire », et non pas un acte politique. Que pensez-vous de l’attitude du pape?

Je ne comprends pas le pape François et je ne le crois pas. Je ne crois pas qu’il fasse des gestes chrétiens ou humanitaires, je crois qu’il se livre à des gestes éminemment politiques. Je ne fais pas partie de l’Église catholique, c’est pourquoi je ne vais pas m’en mêler, mais je m’étonne que cela ne provoque pas des tensions internes plus distinctes au sein de l’Église catholique. Je ne suis pas en mesure d’évaluer de manière suffisante – bien qu’incontestable et historique – la symbolique pascale du lavement des pieds, mais, si tant est que le pape François l’a relié cette année au baisement de pieds, alors je n’ai vraiment pas de mots.

Le ministre tchèque de l’Intérieur, Milan Chovanec, a suspendu temporairement le projet de l’organisation caritative Generace 21 qui visait à réinstaller des chrétiens irakiens en République tchèque. Que pensez-vous de l’échec de ce programme?

Ce « programme », ou plutôt ce geste irréfléchi, purement politiquement correct, ne pouvait qu’échouer. Il s’agit seulement d’un petit exemple de l’échec global des gestes de bienvenue d’Angela Merkel et d’autres politiciens brusselois (ou plutôt pro-brusselois). Si quelqu’un n’en était pas conscient depuis longtemps, alors peut-être que les résultats et les conséquences de ce « projet » lui ont ouvert les yeux. Il n’y a aucun doute sur le fait que ces gens étaient des migrants et non pas des réfugiés. Ils ne fuyaient devant rien, ils aspiraient à une vie meilleure et plus confortable. Ils ont très vite compris qu’une vie meilleure et plus confortable ne s’obtient pas si facilement. Chacun doit y parvenir à l’aide d’un travail acharné.

Le président américain Barack Obama, lors de sa dernière visite en Allemagne, a souligné la « position courageuse » de la chancelière allemande Angela Merkel lors de la crise migratoire. La cheffe du gouvernement allemand, d’après lui, a démontré qu’elle fait preuve d’un vrai leadership moral et politique. Est-ce une preuve, selon-vous, d’une soumission de cette dernière à des intérêts étrangers?

Il y a, il est vrai, des rumeurs à propos de la relation particulière entre le président Obama et la chancelière Merkel, mais je n’en suis pas persuadé. Je crois plutôt qu’ils ont sombré tous les deux dans l’idéologie absurde de l’européisme, bien que chacun pour des raisons différentes. Bien entendu, le président américain doit être satisfait par une Europe unifiée avec un commandement unique, une seule position concernant la politique internationale, avec un seul (comme le disait il y a plus de quarante ans Kissinger) numéro de téléphone. Que les Européens le veuillent également ou non, est une question qui indiffère complètement le président américain. La chancelière allemande souhaite, au contraire, une Europe unie afin que l’Allemagne puisse la diriger, pour qu’il n’y ait pas des parties en Europe qui souhaitent se soustraire à cette administration allemande. Elle souhaite que l’Europe soit unifiée au maximum (ou sinon amalgamée). Les motifs sont certes distincts, mais ils sont complémentaires l’un par rapport à l’autre. Ils se complètent bien.

Bohuslav Sobotka craint un effet domino en cas de Brexit – à savoir d’une sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne. D’après le Premier ministre tchèque, cela aurait pour conséquence d’engendrer, en Europe, une vague de nationalisme et de séparatisme. Quel est votre avis?

Je souhaite que la Grande-Bretagne sorte de l’Union européenne et je souhaite qu’il y ait l’effet domino dont vous parlez.

En tant que personne qui aborde depuis longtemps la question de l’Europe, je suis toutefois conscient que ni l’un ni l’autre ne risquent d’arriver. (Au moins dans un avenir prévisible.) La Grande-Bretagne ne sortira pas de l’UE, c’est pourquoi il n’y aura aucun effet domino. Je suis fondamentalement en désaccord avec le Premier ministre tchèque, lorsqu’il utilise des mots comme nationalisme et séparatisme. Ce sont des mots qui sont utilisés, de manière évidente, pour coller une étiquette négative. Le fait qu’un pays raisonnable, qui ne souhaite pas perdre sa souveraineté et qui refuse une politique économique et sociale pan-européenne, qui souhaite encore moins une armée européenne et une police européenne, veuille également sortir de l’UE, ne relève ni du nationalisme, ni du séparatisme.

Quel est, d’après vous, l’avenir du groupe de Visegrád?

Le groupe de Visegrád, qui se traduit par la recherche de positions communes de quatre pays d’Europe centrale, possède un passé tragique. A l’exception de la mise en place de l’organisation ALECE, l’Accord de libre-échange centre-européen (qui a pris fin avec l’adhésion à l’UE), le groupe n’est parvenu à rien d’autre. Je lui souhaite un avenir meilleur, ce qui signifie qu’il puisse trouver une position commune à l’égard de l’UE.

Propos recueillis et traduits du tchèque par Alimuddin Usmani, laPravda.ch, 25 avril 2016.

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